La militante des droits humains, journaliste et auteure iranienne, Narges Mohammadi a reçu le prix Nobel de la paix 2023 le vendredi 6 octobre, pour son combat contre l’oppression des femmes en Iran et sa lutte pour la promotion des droits humains et de la liberté d’expression pour tous.
Vice-présidente du Centre des défenseurs des droits de l’Homme fondé par Shirin Ebadi, qui avait reçu ce même prix Nobel en 2003, Narges Mohammadi a de nombreuses fois été condamnée et emprisonnée depuis 25 ans.
C’est dans une geôle de la République islamique à Evin où elle est captive depuis avril 2022, que la lauréate a appris sa nomination.
Après l’attribution de cette distinction, l’ONU a demandé sa libération, mais l’Iran a dénoncé « une décision partiale et politique ». « Nous constatons que le Comité Nobel a attribué le Prix de la Paix à une personne reconnue coupable de violations répétées des lois et qui a commis des actes criminels », a réagi le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanani, dans un communiqué relayé par le journal Hamshahri.
Cette distinction du comité norvégien s’adresse aussi à un vaste mouvement de protestation déclenché par le décès le 16 septembre 2022 à Téhéran de Mahsa Amini, il y a un peu plus d’un an.
L’étudiante iranienne d’origine kurde de 22 ans, a été arrêtée par la police pour « port de vêtements inappropriés ».
Plusieurs témoins accusent la police d’avoir violemment battu la jeune femme, entraînant sa mort. Des images de l’hôpital montrent en effet des blessures, et amènent une partie de la population iranienne à conclure que Mahsa Amini est morte d’une hémorragie intracérébrale causée par des violences policières. Cette version est contestée par les autorités, qui donnent deux versions, celle d’un « problème cardiaque soudain » et celle d’une maladie au cerveau.
L’annonce de son décès provoque de nombreuses manifestations, au Kurdistan iranien, mais également dans le milieu universitaire. La répression de ces manifestations est très violente et cause la mort de plusieurs centaines de personnes ainsi que l’arrestation de plusieurs dizaines de milliers.
Narges Mohammadi qui avait publié en 2022 des entretiens avec d’autres prisonnières sous le titre “White Torture” avait déjà reçu en janvier dernier le prix Olof-Palme pour les droits de l’homme, en même temps que Marta Chumalo et Eren Keskin.
Elle est la 19e femme à remporter le Nobel de la paix, vieux de 122 ans.
Dans une lettre écrite en juin derrière les murs de la prison d’Evin et publiée dans ces colonnes à la veille du premier anniversaire de la mort de Mahsa Amini, Narges Mohammadi en faisait le constat. « Si vous regardez attentivement la société iranienne, vous verrez que chaque individu, à tout moment de sa vie et en tout lieu, est coupable du désir de vivre » aux yeux du régime, écrivait-elle, convaincue pour autant que le combat des Iraniens pour leurs libertés ne s’éteindra pas.
Séparée de sa famille, qui est réfugiée à Paris, elle suivra la remise de son Prix de sa cellule. Espérons que l’espoir qu’offre cette distinction l’aideront à garder espoir et à avancer vers une libération que nous souhaitons imminente. Elle est une reconnaissance pour toutes celles qui luttent contre l’obscurantisme.
Carole Mesrobian